Sylvie Vartan - On nest pas couché 12 septembre 2009. Album "Toutes peines confondues".
C'était le 24 décembre 1952, aux premières heures de la matinée. Il pleuvait sur la gare de Lyon, mais il aurait pu tomber du mazout que nous aurions trouvé Paris magnifique ! Maman resplendissait en dépit de la fatigue du voyage et papa souriait. Oui, papa souriait, malgré la pluie dehors, malgré le froid, malgré la bousculade sur le quai. On sentait que c'était un sourire de l'intérieur, un sourire qui venait de loin et qui le transportait. Il avait gagné ce petit bonhomme, mon papa, il avait sorti les siens du plus sombre des mondes au prix de deux années de misère, d'acharnement, de courage, et maintenant il regardait s'écouler la foule autour de nous avec cet air extatique des évadés, des miraculés. Qu'est-ce qu'il en avait à faire que nous n'ayons plus de maison, que nous n'ayons plus rien véritablement sur la terre que notre malle en osier, puisque nous étions là, tous les quatre, vivants ?
Prendre le temps,c'est aussi prendre le risque de se retourner,de se souvenir.
Oui,un jour cela cesse brusquement de me faire rire,et ce jour-là,où plutôt cette nuit-là,je me lève et je vais la prendre dans mes bras.J'ai onze ans dans mon souvenir,ou peut-être douze.
Maman,de nouveau le cœur déchiré entre ses deux enfants,son fils qu'elle aurait voulu rejoindre et moi qui la suppliais de rester,de ne pas m'abandonner.
"Je pense à tous les pièges qui m'attendent et que j'essaie d'éviter. Les amours de quelques jours qui ne vous laissent après qu'un gout amer et le cœur un peu plus meurtri. Parce qu'on a trop donné, sans calculer, sans se protéger. Non, merci, ça finit par vous user, vous entamer. Ne pas tomber dans la facilité. Il faut savoir résister".
Mais que faut-il croire, dans cet incessant ballet d'articles, prétexte à de somptueuses couvertures ? Est-il question dans les pages des magazines de leur vie rêvée ou de leur vie vécue que révèle une écoute attentive de leurs chansons du moment ?
Le père décide un jour que c'en est assez, qu'il ne peut plus travailler sereinement dans cette atmosphère d'hostilité et il démissionne et il démissionne brutalement, abandonnant le chantier aux ingénieurs bulgares.
Quatre ans plus tard,en revanche,quand nous fuirons la Bulgarie et que je reverrai ma mère pleurer dans la train,ses larmes marqueront pour moi la fin de mes tendres années.
Enfin arrive le jour du départ. Le train est vide et nous sommes les seuls voyageurs à monter dedans.